Je vais m’arrêter sur un point qui suscite beaucoup de questions, parce qu’on entend beaucoup parler depuis quelques temps de régimes low carb et cétogène, dans lesquels on consomme beaucoup de gras et très peu (voir pas du tout) de glucides.
Le régime low carb et le régime cétogène pour la perte de graisse corporelle
S’il est vrai qu’une alimentation low carb ou cétogène fait perdre rapidement du poids, il s’agit essentiellement d’une perte en eau. En effet, les glucides stockés dans l’organisme sous forme de glycogène sont liés à de l’eau. On peut compter environ 3 grammes d’eau pour 1 g de glycogène. Si vous videz vos stocks de glycogène, vous vous videz également de cette eau.
Les résultats d’une étude publiée en 2016 (1) précisent que « la perte de graisse corporelle a ralenti pendant le régime cétogène et a coïncidé avec une augmentation de l’utilisation des protéines et une perte de masse sans graisse » et conclue que « le régime cétogène n’a pas été accompagné d’une perte accrue de graisse corporelle mais a été associé à des augmentations relativement faibles de la dépense énergétique qui étaient proches des limites de détection avec l’utilisation d’une technologie de pointe. »
Si votre objectif est de perdre du gras, je vous conseille la lecture de mon livre « Perdez du gras sans compter vos calories » qui détaille une méthode complète, facile et efficace.
Régime low carb et le régime cétogène pour le sport
Sur le plan sportif, c’est vrai qu’il existe des athlètes low carb et que certains s’en sortent très bien avec ce type d’alimentation. Sachez quand même qu’il s’agit d’exceptions plutôt que de la règle, et qu’on ne peut pas se lancer tête baissée sur un entrainement avec ce type de régime. Cela demande une certaine habitude.
Les substrats énergétiques
Déjà, retirez vous de la tête qu’on peut faire du sport à haute intensité au maximum de ses capacités sans glucides, c’est purement impossible. Jetez un oeil sur les courbes des substrats énergétiques ci-dessous, vous comprendrez que l’organisme va forcément chercher à puiser dans les sucres (glucides) pour fournir de l’énergie. Et si vous videz complètements vos réserves de glycogène vous risquez de devoir vous arrêter net. Voir même de faire un malaise dans les cas les plus extrêmes. Dans tous les cas, vous serez en sous-performance sans glucides.

En revanche on peut entrainer son corps à moins dépendre du sucre et à utiliser d’avantage les graisses comme carburant. Il existe plusieurs protocoles d’entrainements qui ont cet objectif, dont le plus connu est le footing à jeun.
Si vous partez courir sans rien dans le ventre, vous n’aurez que votre petite réserve de glycogène à fournir comme substrat glucidique, et vous allez inciter votre organisme à puiser dans vos stocks graisseux.
Plus vous irez lentement, plus ce sera efficace. Le déstockage des graisses pour utilisation comme carburant s’enclenche avec une intensité faible à modérée. Plus vous allez mettre de la difficulté et de l’intensité, plus votre corps va chercher des glucides. Si vous partez dans un entrainement intense à jeun et que vous videz complètement votre stock de glycogène, vous risquez de mal finir.
Donc l’entrainement à jeun pourquoi pas, mais sachez être mesuré et progressif. Réhabituer son corps à faire autrement qu’avec ses vieilles habitudes, ça demande du temps, de la patience, et de la prudence.
Si votre souhait est réellement de tester l’entrainement avec un taux de glycogène bas, je ne saurais que trop vous conseiller l’excellent livre de Fabrice KUHN « Ultra performance ». Vous y trouverez une information complète et des protocoles d’entrainement.
Lipides vs glucides pour la performance
Sachez néanmoins que même si certains témoignages sont encourageants, ils restent anecdotiques au regard du nombre de pratiquants, et que cette pratique n’a pas encore prouvé son efficacité scientifiquement.
Une étude de 2017 (2) conclue que « contrairement à l’entraînement avec des régimes fournissant une haute disponibilité chronique ou périodique de glucides, l’adaptation à un régime LCHF (low carb high fat : régime cétogène pauvre en glucides et riche en graisses) altère les performances des athlètes d’endurance d’élite malgré une amélioration significative de la capacité aérobie maximale (…) en partie en raison d’une économie d’exercice réduite. »
Une étude publiée en 2019 (3) précise que « Si la durée de l’exercice est suffisamment longue (par exemple ≥ 10h) et l’intensité de l’exercice suffisamment faible (par exemple 45-60% de la consommation maximale d’oxygène), il est bioénergétiquement plausible que l’adaptation cétogène puisse améliorer la performance en ultra-endurance, mais cela nécessite une justification scientifique. Inversement, la littérature scientifique a démontré de manière cohérente que les glucides alimentaires quotidiens (3-12g/kg/jour) et la consommation de glucides (30-110g/h) pendant les épreuves d’ultra-endurance peuvent améliorer les performances à des taux de consommation individuellement tolérables. »
Références
(1) Hall KD, Chen KY, Guo J, Lam YY, Leibel RL, Mayer LE, Reitman ML, Rosenbaum M, Smith SR, Walsh BT, Ravussin E. Energy expenditure and body composition changes after an isocaloric ketogenic diet in overweight and obese men. Am J Clin Nutr. 2016 Aug;104(2):324-33. doi: 10.3945/ajcn.116.133561. Epub 2016 Jul 6. PMID: 27385608; PMCID: PMC4962163.
(2) Burke LM, Ross ML, Garvican-Lewis LA, Welvaert M, Heikura IA, Forbes SG, Mirtschin JG, Cato LE, Strobel N, Sharma AP, Hawley JA. Low carbohydrate, high fat diet impairs exercise economy and negates the performance benefit from intensified training in elite race walkers. J Physiol. 2017 May 1;595(9):2785-2807. doi: 10.1113/JP273230. Epub 2017 Feb 14. PMID: 28012184; PMCID: PMC5407976.
(3) Costa RJS, Hoffman MD, Stellingwerff T. Considerations for ultra-endurance activities: part 1- nutrition. Res Sports Med. 2019 Apr-Jun;27(2):166-181. doi: 10.1080/15438627.2018.1502188. Epub 2018 Jul 28. PMID: 30056753.